Il y a maintenant une dizaine de jours que j'ai terminé de jouer la séquence narrative principale de Red Dead Redemption. Il y a aussi une dizaine de jours que j'attends de pouvoir partager en toute connaissance de cause le court métrage connexe commandé au cinéaste John Hillcoat (réalisateur du western contemporain The Proposition, et plus récemment de l'adaptation du roman The Road). Diffusé la semaine dernière sur la chaîne américaine FOX à heure d'écoute restreinte, le film entièrement réalisé à partir des ressources internes du jeu a finalement été mis en ligne, ce qui me permet d'en parler aujourd'hui sur des bases moins spéculatives.
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un objet promotionnel assez hors du commun. Composé de quelques scènes du premier acte de Redemption, raccourcies par-ci par-là et reliées lâchement par des escapades en plein air, le film condense les événements d'une dizaine d'heures de jeu en 29 minutes facilement digestibles. Les « acteurs » virtuels étant déjà dirigés, les dialogues déjà enregistrés, le travail de Hillcoat se limite essentiellement à superviser quelques interventions plastiques mineures, telles que l'ajustement de l'éclairage et la conception de nouveaux cadrages et mouvements de caméra. Ainsi le rythme est-il adroitement soutenu, certaines ellipses et altérations du scénario sont assez ingénieuses, et le traitement réservé aux passages laissés d'ordinaire entre les mains du joueur s'avère passablement percutant, compte tenu des limites du matériau. Le niveau de violence est aussi considérablement allégé, ce qui a notamment pour effet de rendre les affrontements plus vraisemblables.
Ainsi, le tout s'avère largement conforme à ce que l'on attend d'un programme destiné à la diffusion télévisuelle. Mais honore-t-il pour autant les accomplissements particuliers de Red Dead Redemption, et par extension la nature spécifique du jeu vidéo?
L'un des grands intérêts d'un jeu aux aspirations cinématographiques tel que celui-ci est de vivre une alternance de passivité spectatorielle, attribuant une part d'autonomie au récit, et de participation dynamique aux événements et à leur mise en forme. Au coeur de ce va-et-vient, il devient possible d'atteindre un niveau d'intimité avec le protagoniste jusqu'ici inégalé par les autres formes artistiques ; un rapport d'autant plus renforcé lorsque le personnage occupe l'avant-plan de l'image en tout temps, que son action est transmise intégralement, et qu'il semble occuper physiquement l'univers qui l'entoure de manière aussi convaincante que dans les récentes productions de Rockstar.
C'est donc dire que le modèle d'identification proposé par le jeu vidéo s'avère largement contraire à celui de la télévision, fonctionnant selon un régime d'économie, de distance et d'efficacité. Les jeux de type « open-world », tout particulièrement, requièrent un degré de projection se construisant nécessairement à long terme, à force de familiarisation avec les lieux, repères et touches atmosphériques qui, plus que des simples décorations, contribuent au sens général de l'oeuvre. Et malgré tous ses problèmes auxquels je m'attarderai de nouveau éventuellement, Red Dead Redemption est un exemple brillant du partage possible entre le joueur et le monde à sa disposition. Le court métrage de Hillcoat, simple montage de fragments isolés, ne peut quant à lui qu'effleurer la surface d'une telle manière de présenter les choses.
Cela dit, il n'y a pas non plus là de quoi faire un drame. Ne dissimulant aucunement sa nature de simple avant-goût, le film s'avère parfaitement compétent dans sa démonstration des atouts esthétiques de Red Dead Redemption, particulièrement lorsqu'il s'arrête sur les détails qui, ensemble, composent une atmosphère aussi riche. Et si on ne peut pas vraiment dire que le sort de la compagnie dépend du succès de cette manoeuvre publicitaire (les ventes du jeu ont apparemment dépassé le cap des 5 millions d'unités), il est intéressant de voir Rockstar s'adonner à ce genre d'exercice, et exhiber fièrement leurs intermèdes narratifs comptant toujours parmi les mieux produits de l'industrie.
Vous pouvez visionner le film entier en visitant le site officiel de Red Dead Redemption.
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un objet promotionnel assez hors du commun. Composé de quelques scènes du premier acte de Redemption, raccourcies par-ci par-là et reliées lâchement par des escapades en plein air, le film condense les événements d'une dizaine d'heures de jeu en 29 minutes facilement digestibles. Les « acteurs » virtuels étant déjà dirigés, les dialogues déjà enregistrés, le travail de Hillcoat se limite essentiellement à superviser quelques interventions plastiques mineures, telles que l'ajustement de l'éclairage et la conception de nouveaux cadrages et mouvements de caméra. Ainsi le rythme est-il adroitement soutenu, certaines ellipses et altérations du scénario sont assez ingénieuses, et le traitement réservé aux passages laissés d'ordinaire entre les mains du joueur s'avère passablement percutant, compte tenu des limites du matériau. Le niveau de violence est aussi considérablement allégé, ce qui a notamment pour effet de rendre les affrontements plus vraisemblables.
Ainsi, le tout s'avère largement conforme à ce que l'on attend d'un programme destiné à la diffusion télévisuelle. Mais honore-t-il pour autant les accomplissements particuliers de Red Dead Redemption, et par extension la nature spécifique du jeu vidéo?
L'un des grands intérêts d'un jeu aux aspirations cinématographiques tel que celui-ci est de vivre une alternance de passivité spectatorielle, attribuant une part d'autonomie au récit, et de participation dynamique aux événements et à leur mise en forme. Au coeur de ce va-et-vient, il devient possible d'atteindre un niveau d'intimité avec le protagoniste jusqu'ici inégalé par les autres formes artistiques ; un rapport d'autant plus renforcé lorsque le personnage occupe l'avant-plan de l'image en tout temps, que son action est transmise intégralement, et qu'il semble occuper physiquement l'univers qui l'entoure de manière aussi convaincante que dans les récentes productions de Rockstar.
C'est donc dire que le modèle d'identification proposé par le jeu vidéo s'avère largement contraire à celui de la télévision, fonctionnant selon un régime d'économie, de distance et d'efficacité. Les jeux de type « open-world », tout particulièrement, requièrent un degré de projection se construisant nécessairement à long terme, à force de familiarisation avec les lieux, repères et touches atmosphériques qui, plus que des simples décorations, contribuent au sens général de l'oeuvre. Et malgré tous ses problèmes auxquels je m'attarderai de nouveau éventuellement, Red Dead Redemption est un exemple brillant du partage possible entre le joueur et le monde à sa disposition. Le court métrage de Hillcoat, simple montage de fragments isolés, ne peut quant à lui qu'effleurer la surface d'une telle manière de présenter les choses.
Cela dit, il n'y a pas non plus là de quoi faire un drame. Ne dissimulant aucunement sa nature de simple avant-goût, le film s'avère parfaitement compétent dans sa démonstration des atouts esthétiques de Red Dead Redemption, particulièrement lorsqu'il s'arrête sur les détails qui, ensemble, composent une atmosphère aussi riche. Et si on ne peut pas vraiment dire que le sort de la compagnie dépend du succès de cette manoeuvre publicitaire (les ventes du jeu ont apparemment dépassé le cap des 5 millions d'unités), il est intéressant de voir Rockstar s'adonner à ce genre d'exercice, et exhiber fièrement leurs intermèdes narratifs comptant toujours parmi les mieux produits de l'industrie.
Vous pouvez visionner le film entier en visitant le site officiel de Red Dead Redemption.
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